un métier: cheminot

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Re: un métier: cheminot

Messagepar Undertaker
06 Nov 2015, 22:22

Ferrovia a écrit:Le Y 20 n'a semble-t-il jamais vraiment donné satisfaction (problèmes de galop, la liaison entre balanciers et boites d'essieux posait peut-être aussi problème?).
Quand les BB 27000 ont été mises en service, il y a eu d'importants problèmes vibratoires transmis par la barre de traction-compression de la liaison caisse-bogie . La BB 27001 a été testée sur le banc d'essai SNCF de Vitry-sur-Seine. Il a été constaté que le galop de bogie introduisait un mode vibratoire longitudinal (basse fréquence) à la caisse. Alain Moreau (dont sncb-nmbs nous a posté une vidéo bien plus en amont) avait déclaré : "ça me rappelle le mode vibratoire de l' Y 20". Le problème a été solutionné en changeant la raideur des silentblocs caoutchouc des têtes de la barre de traction-compression afin d'éliminer la raisonnance des modes vibratoires. Par contre, il y a truc que je n'ai jamais compris : l'électricien Pierre Chanal (Alstom Transport) m'avait dit que cette barre de traction-compression introduisait une fréquence parasite à 3 Hz dans les moteurs de traction :o :o :o Apparemment, la résolution du problème mécanique est aussi allé dans son sens, ne me demandez surtout pas pourquoi ?
Le Y 24 ressemble d'ailleurs à un Y 20 amélioré (biellettes d'asservissement longitudinal alignées pour supprimer le galop, balanciers plus traditionnels).
Oui, l 'Y 24 semble être synthèse entre l'amélioration de l' Y 20 et le retour aux balanciers de l' Y 16.

Le Y 28 (sans indice) avait, il me semble, des longerons très incurvés comme le Y 270 et très différents des bogies de série.
Oui, une photo de ce bogie sous une A8 DEV AO l'illustre
Undertaker
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Re: un métier: cheminot

Messagepar LX4MZ211
07 Nov 2015, 22:35

Undertaker a écrit:Bonjour,


Revenons à notre conversation et au bogie Y 207. Mr Mauzin, abondamment cité dans l’extrait de la revue AFAC était surtout un "essayeur", ce qui ne retire en rien à ses qualités d’ingénieur, à ses réalisations, à son expertise et aux recommandations qu’il a apportées au monde ferroviaire. Par contre, le bogie Y 207 est du à un concepteur, l’ingénieur SNCF Gaston Chalmel de la DEA (Division des Études d’Autorails). Claude, alors jeune dessinateur, en avait tracé le dessin d’ensemble. Les quatre bogies Y 207 ont été réalisés par les ateliers SNCF de Périgueux. Ils ont en outre été essayés sous des voitures DEV et sous une voiture TEE inox M69. Comme évoqué plus haut, la crainte de la rupture des consoles (pendants) "C" ont un peu freiné les destinées de ces bogies. Alors, Gaston Chalmel a persévéré dans le développement des bogies dont la suspension est assurée par des barres de torsion. Il avait ainsi développé le bogie Y 214 qui a équipé le turbotrain TGS. Cette fois-ci, il n’y avait plus de crainte des "C", puisque les longerons articulés reposent sur les boites d’essieux. Claude m’a confié que ces bogies étaient très souples et qu’on pouvait même soulever une des quatre roues de 150 mm alors que les trois autres restaient en contact avec les rails…


UTKR.


Bonsoir, merci de ces précisions !

Effectivement, tel que montré à travers les extraits choisis par EC64, on a l'impression que l'article de l'AFAC présente le Y207, comme "fils" des technologies Mauzin. J'avais, de là, fais un raccourci trop rapide.

Resterait à comprendre ce que l'auteur entend par là; il évoque notamment le "laisser faire" proné par Mauzin. Si je comprends, l'idée serait plutôt de dire que ce qui importe le plus est une relation bogie/ caisse qui transmette à cette dernière, le moins possible, les mouvements du bogie, plutôt que de brider ceux-ci.

J'ai regardé si par hasard SNCF avait breveté le Y207... et bien oui !
Avec comme inventeurs MM Gaston Chalmel et Maurice REY (vous connaissez ce dernier? De quel service était-il, DEA aussi?).

La revendication principale porte sur le fait que ce type de bogie a été inventé afin de réduire le plus possible la masse du bogie en supprimant les lourdes traverses et cadres. La masse de la caisse est reportée directement sur les boites d'essieu. Le cadre du bogie ne sert qu'à assurer le parallélisme avec grande rigidité dans le plan horizontal mais acceptant du voilage.

Voici quelques vues de la demande déposée le 11 juin 1964.

Y 207 (2).jpg


Y 207 (1).jpg


PS: EC64, pourriez vous nous dire sous quelle signature est paru l'article sur les bogies ?

Merci

Bonne soirée
LX4MZ211
 
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Re: un métier: cheminot

Messagepar EC64
07 Nov 2015, 23:49

L'auteur est incontestablement une référence en la matière

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Re: un métier: cheminot

Messagepar Undertaker
08 Nov 2015, 10:33

LX4MZ211 a écrit:
il évoque notamment le "laisser faire" proné par Mauzin.
Vaste sujet !!!
J'ai regardé si par hasard SNCF avait breveté le Y207... et bien oui !
Avec comme inventeurs MM Gaston Chalmel et Maurice REY (vous connaissez ce dernier? De quel service était-il, DEA aussi?).

Bonjour,

Je n'ai pas connu Gaston Chalmel (1907-1993). Par contre, j'ai connu Maurice Rey. Il est également un ancien de la DEA, avec lequel je n'ai jamais travaillé mais que je saluais lorsque j'allais rendre visite à mon acolyte Claude Sery pour nos travaux communs sur les TGV. Maurice Rey est né en 1921 et vit toujours à Montigny-les-Cormeilles....

UTKR.
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Re: un métier: cheminot

Messagepar BB63670
08 Nov 2015, 15:29

C'est marrant, quand on regarde le bogie Y214, on a vraiment l'impression de voir deux trains arrières automobiles accolés, avec leurs barres anti roulis et leurs bras de suspension. A ceci près que les roues ne sont pas indépendantes.
BB63670
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Re: un métier: cheminot

Messagepar Undertaker
16 Nov 2015, 09:40

Bonjour,

La liaison caisse/bogie, dans sa plus simple architecture et hormis les timoneries de freinage, est en général constituée par un pivot autour duquel le bogie tourne et des lisoirs sur lesquels s’appuie la caisse par l’intermédiaire d’une traverse qui repose sur un étage de suspension. Avec l’accroissement des vitesses et la sophistication des bogies, il est apparu nécessaire d’amortir les mouvements entre la caisse et les bogies afin d’accroitre le confort et la stabilité de marche. A l’origine les amortisseurs étaient à friction alors que rapidement l’amortisseur hydraulique s’est imposé.
La figure ci-dessous - le schéma de l’articulation des remorques TGV - illustre l’emplacement et la terminologie utilisés pour l'essentiel des amortisseurs assurant les liaisons caisse-bogie. Les amortisseurs anti-galop ne concernent que le bogie : leur rôle est d’amortir le galop de la boite d’essieu. L'amortisseur anti-gîte ne concerne que les caisses entre-elles. Quant aux autres, ils assurent l'amortissement des mouvements relatifs entre la caisse et le(s) bogie(s). Si ces organes offrent l'avantage d'amortir les déplacements entre les éléments qu'ils relient, ils ont l'inconvénient de se comporter en "shunts vibratoires", le bogie étant le générateur des vibrations. Les amortisseurs sont parfois appelés à tort "vérins". En effet, un vérin est une pièce active alors que l’amortisseur est une pièce passive : on doit donc dire un amortisseur antilacet et non pas un "vérin antilacet".


Lorsque nous avions repris les études pour l'amélioration du confort vibratoire des TGV, nous menions de front deux formules distinctes : l'application d'une suspension pneumatique à une rame TGV PSE de série (la rame n°10 en l'occurrence) et le TGV 001 démotorisé sur suspensions métalliques. Ces deux rames, de type articulé, se caractérisent par :
- tous TGV de série : avec une liaison entre caisses constituée de deux anneaux reliés par une rotule dont seul l'anneau porteur repose sur la suspension secondaire (voir schéma ci-dessus). Autrement dit, chaque remorque repose à une extrémité sur une suspension et à l'autre sur une rotule. La rotule, qui porte la charge d'une extrémité, assure aussi les déplacements angulaires et la fonction choc et traction. Cette disposition commence depuis les remorques extrêmes pour se rejoindre vers le centre, à la remorque R4, qui constitue la "clé mécanique" de la rame. La remorque R4 repose donc sur 4 ressorts par l'intermédiaire de deux anneaux porteurs. (les TGV TMST et Duplex n'ont pas d'anneaux mais des structures rapportées sur les dossiers de caisse, le principe énoncé ci-dessus restant évidemment le même). Nous avons tous en tête les vertus de la rame articulée, par contre les rotules de liaison entre remorques se comportent également en transmetteurs de vibrations, créant ainsi un mode vibratoire complexe de l'ensemble du tronçon articulé. C'est ce que nous appelions "l'effet de rame".
- le TGV 001 démotorisé : afin de s'affranchir de l'effet de rame, nous avions opté pour un découplage total des caisses où chaque véhicule avait été doté d'un anneau de type porteur à ses deux extrémités. Ainsi, chaque remorque reposait sur 4 ressorts dont la suspension était indépendante des véhicules adjacents. La fonction choc et traction était réalisée par une barre d'attelage identique à celle des voitures RIB. L'intercirculation était assurée par un anneau articulé sur la coquille de fermeture de la barre d'attelage et reliée par deux soufflets de type TGV se série.

Afin de rationaliser les marches d'essais, c'était la rame TGV PSE n°10 qui tractait le TGV 001. Elle avait été "boostée" pour tracter le TGV 001 jusqu'à 320 km/h sur la LGV Paris-Lyon.
Claude Moreau était un ancien de la DETE, proche collaborateur de Fernand Nouvion, puis était parti au Département des essais, pour revenir au Département Construction en qualité de Chef des essais des TGV PSE. C'est donc sous son commandement que j'avais été chef de bord des rames "Patrick et Sophie". Un jour, il nous a rendu visite sur une circulation TGV n°10/001. Attendu que les résultats étaient encourageants à défaut d'être satisfaisants, il m'avait dit : "vous savez, le bogie fait ce qu'il veut dans la voie" !

Dans la voiture labo, il y avait une chaine de mesures dont les enregistreurs crachaient des dizaines de mètres de papier relevant les niveaux vibratoires de plusieurs éléments. Certes, les amplitudes des oscillations permettaient d’apprécier ces divers niveaux, mais j’avoue que j’étais un peu hermétique à tous ces enregistrements. Alors, un jour, je m'étais décidé à aller voir d’un peu plus près le comportement d’un de ces bogies. Il m’avait suffi de relever les passerelles d’intercirculation, de déposer un plancher de l’un des anneaux et de déconnecter la base d’un soufflet. J’avais donc vue sur la barre d’attelage et juste en-dessous se trouvait le châssis de bogie. M’étant allongé à plat ventre dans l’intercirculation, j’avais réussi à poser la main sur le bogie en tendant le bras. Outre le vacarme du au roulement, je peux vous dire qu’un bogie de 8 tonnes ça dégage une énergie certaine dans ses mouvements….



Les rames TGV PSE ont toutes été livrées avec des suspensions métalliques. Plusieurs types de ressorts (pour les bogies articulés) ont été essayés avec des raideurs différentes et avec apport de sommiers caoutchouc. Aucun d’entre eux n’avait donné satisfaction, au mieux on pouvait parler du "moins mauvais".
Quant au TGV 001, sa suspension métallique était un peu meilleure que celle des TGV PSE d'origine. Une version de suspension pneumatique avait également été testée qui avait donné d’excellents, voire inouïs, résultats obtenus avec des bogies équipés de roues à profil neuf. Par contre, avec des roues à profil fortement usé, la rame était devenue instable à grande vitesse, ce qui a donné le coup d’arrêt à la formule des caisses indépendantes sur un même bogie. De plus, cette solution aurait forcément été plus couteuse en maintenance.

Tous les efforts pour l'amélioration du confort des rames TGV se sont concentrés sur la rame TGV n°10. La solution a consisté à définir la membrane pneumatique optimisée associée à son réservoir d'air et à supprimer le plus grand nombre d'amortisseurs reliant la caisse et le bogie, en particulier les amortisseurs transversaux et verticaux, supprimant de fait leur rôle néfaste de "shunts vibratoires". Les fonctions de ces amortisseurs, néanmoins essentielles au confort, ont été remplacées par celles d'amortisseurs longitudinaux caisse/caisse qui amortissent les mouvements des caisses entre elles et laissent "faire le bogie ce qu'il veut dans la voie". Seuls les amortisseurs antilacet ont été conservés car ils sont les garants de la stabilité du bogie à très grande vitesse et les amortisseurs anti-gite reliant les caisses entre elles en partie haute.


UTKR.

PS : quelle tristesse et sincères condoléances pour les victimes du déraillement (encore inexpliqué) du TGV d'essais en Alsace.
Undertaker
Bavard
 

Re: un métier: cheminot

Messagepar BURLINGTON
24 Nov 2015, 19:43

Undertaker a écrit:Bonsoir,

A la fin des années 1950, lorsque les premiers pantographes unijambistes sont apparus, ils ont été placés sur la toiture des locomotives avec le genou d’articulation orienté vers le centre de la locomotive, ce qui en a fait une tradition bien française....
UTKR

A la lecture de ce post, une photo m'est revenue à l'esprit

Cette CC algérienne proche des CC7100 SNCF, produite à la même époque avec des pantographes unijambistes avec le genou tourné vers l'extérieur.
Surprenant car à l'époque les CFA était quand même très français. Une idée :?:
A noter la caténaire très "midi" ;)
Modifié en dernier par BURLINGTON le 24 Nov 2015, 20:52, modifié 1 fois.
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Re: un métier: cheminot

Messagepar Undertaker
24 Nov 2015, 20:46

BURLINGTON a écrit:Cette CC algérienne proche des CC7100 SNCF, produite à la même époque avec des pantographes unijambistes avec le genou tourné vers l'extérieur.
Surprenant car à l'époque les CFA était quand très français. Une idée :?:

Peut-être aurais-je du écrire "tradition bien SNCFienne mais pas forcément Alsthomienne" :siffle: :siffle: :siffle:





et d'autres.....

UTKR.
Undertaker
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Re: un métier: cheminot

Messagepar BURLINGTON
24 Nov 2015, 20:52

Ok ;) Merci de ta réponse.
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Re: un métier: cheminot

Messagepar Undertaker
08 Déc 2015, 22:55

Bonsoir,

A propos de l'image de l'articulation des caisses du TGV 001 A démotorisé (postée juste un peu en amont) j'ai poursuivi mes investigations. Il a suffi:
- d'en parler sur FT.
- que cela ravive des souvenirs.
- de rencontrer un pote encore en activité.
- de lui en parler.
- de lui donner deux ou trois indices pour ses recherches.
Et BINGO ! Voici les dessins réalisés en 1982 pour une étude que j'avais particulièrement appréciée.





On voit bien qu'à cette époque nous étions dans le recherche fondamentale......

2B.
Undertaker
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