Voies métriques et étroites à la DRG
En marge de la petite histoire de la DRG, je vais livrer ici les renseignements dont je dispose à propos des locomotives allemandes pour voies métriques et étroites qui furent intégrées à la DRG. Même si le développement de telles lignes n'a pas connu en Allemagne l'ampleur de celui des chemins de fer départementaux français ou des vicinaux belges, il fut néanmoins l'occasion de voir se développer quelques machines assez singulières. Nous allons donc les étudier.
Mais avant d'entrer dans le vif du sujet, un rappel des modes de classification des locomotives allemandes pour voies métriques et étroites s'impose.
Préambule :
La classification allemande des locomotives pour voies étroite et métrique
Rappelons tout d’abord que la désignation allemande ne fait pas de distinction entre voie « métrique » et « étroite ». Toutes les locomotives dont l’écartement des roues est inférieur à l’écartement standard de 1435 mm se voient qualifiées de « Schmalspurlokomotiven » - autrement dit de « locomotives pour voie étroite ».
1) La classification prussienne
A l’initiative de la Direction Royale des Chemins de Fer (KED) d’Elberfeld, la Prusse avait mis en place dès 1903 les désignations de catégorie S, P et G respectivement pour les locomotives à tender attelé dédiées aux services voyageurs express et omnibus et au trafic des marchandises.
Les locomotives-tender par contre recevaient toutes la lettre T. Aucune distinction n’était faite entre leurs statuts de machines pour les services voyageur ou marchandises ni ne permettait de distinguer entre des locomotives à écartement normal ou étroit ni même à crémaillère.
La distinction mise en place à partir de la T8 (future BR 890), affectant des numéros de catégorie pairs aux machines à vapeur surchauffée et des numéros impairs aux machines à vapeur saturée, ne s’appliqua pas aux locomotives pour voie étroite ou à crémaillère.
Les locomotives pour voies étroites se virent réserver la plage de numérotation T31 à T40. Aucune distinction n’était faite entre les machines pour voie métrique et les machines pour voie de 785 mm circulant en Haute Silésie. Ainsi, les locomotives T31 à T35 et T40 étaient des machines pour voie métrique et les locomotives T36 à T39 étaient à écartement de 785 mm. Les T31 furent même construites aux deux écartements.
Tout comme les locomotives à écartement normal, les locomotives pour voies étroites portaient le nom de leur Direction Régionale suivi d’un numéro en chiffres arabes. Des plages de numéros étaient affectées à chaque série ou catégorie et chaque Direction utilisait la même plage pour les mêmes locomotives. Il y eut donc, par exemple, une T33 « CÖLN 51 » et une T33 « ERFURT 51 »
2) La classification bavaroise
La Bavière utilisa, à partir de 1901, une classification par catégorie : S = Schnellzug ; P = Personenzug ; G = Güterzug ; R = Rangierlokomotive (Locomotive de triage ou de manœuvre). Les locomotives-tender, essentiellement affectées au triage, reçurent en plus la lettre « t » ; les locomotives des lignes locales à voie normale reçurent la lettre « L » ; les locomotives pour voies étroites reçurent la lettre additionnelle « s » (pour "schmallspurig")et les locomotives à crémaillère, la lettre « z » (pour "Zahnrad").
Les machines étaient ensuite identifiées par leur disposition d’essieux sous forme de fraction : les essieux moteurs au numérateur ; le total des essieux au dénominateur.
De ce fait, une locomotive PtzL ¾ était une locomotive-tender à quatre essieux pour le service voyageur omnibus sur les lignes locales, équipée d’un mécanisme à crémaillère et dont trois des essieux étaient moteurs. Ce que n’indique pas cette désignation, c’est si la machines est une 1’C (130) ou une C1’ (031).
De même, une Gts 2 x 3/3 était une locomotive-tender pour voie étroite dédiée au trafic marchandise dotée de deux unités de trois essieux moteurs. C’était une Mallet.
3) La classification palatine
Jusqu’à sa fusion avec les chemins de fer bavarois en 1909, le Palatinat désignait ses locomotives pour voie métrique avec la lettre « L » et les chiffres 1 ou 2. (Il n’y eut que deux catégories). Les immatriculations des machines au sein des catégories se faisaient en chiffres romains. Après la fusion, la classification bavaroise fut adoptée mais les chiffres romains furent conservés.
4) La classification saxonne
En Saxe, la classification des locomotives pour voies étroites était initialement identique à celles des autres locomotives. A partir de la fin de années 1890, l’on créa une série spéciale regroupant l’ensemble des locomotives pour voies étroites, commençant par le chiffre romain « I » et suivi par la lettre « K » Cette numérotation fut confirmée en 1900 par la création de catégories I K, II K, etc. Chaque nouvelle catégorie recevait un numéro incrémenté (I K = locomotive à trois essieux ; II K = locomotive double construite sur la base de deux locomotives I K ; III K = locomotive à trois essieux accouplés et un essieu porteur).
L’unique locomotive pour voie métrique de Saxe reçut la classification I M.
5) La classification wurtembergeoise
Le Wurtemberg classait ses locomotives-tender sous la lettre « T », qu’elles fussent pour voies normale ou étroite. Les locomotives pour voie métrique reçurent la lettre complémentaire « s », celles pour voie de 750 mm furent identifiées « ss ». Des chiffres arabes identifiaient ensuite le nombre d’essieux accouplés. De la sorte, une Ts 3 était une locomotive-tender à trois essieux accouplés pour voie métrique et une Tss 4 était une locomotive-tender à quatre essieux accouplés pour voie de 750 mm. Les locomotives Mallet reçurent la lettre d’identification « d » pour « duplex » (deux unités motrices). La Tssd était ainsi une locomotive-tender Mallet B’Bn4v pour voie de 750 mm.
6) La classification badoise
Le duché de Bade n’avait sur son territoire qu’une seule ligne à voie étroite, reliant Mosbach à Mudau, ligne exploitée par une compagnie privée. Les chemins de fer badois ne créèrent donc aucune numérotation spécifique pour ce matériel.
7) La classification de la DRG
La DRG mit en place une numérotation plus précise et dédiée aux locomotives pour voies étroites qui engloba aussi bien les locomotives intégrées des anciens états que les machines unifiées conçues après sa création. Elle regroupa l’ensemble de ces machines dans une série générique : la série 99. Au sein de cette série, la DRG organisa les plages de numérotation en fonction de l’écartement des voies :
Numéros 99 001 à 299 : locomotives à écartement de 1000 mm, dit « métrique ».
Numéros 99 301 à 399 : locomotives à écartement de 900 mm.
Numéros 99 401 à 499 : locomotives à écartement de 785 mm.
Numéros 99 501 à 799 : locomotives à écartement de 750 mm.
Les locomotives provenant des anciens états et dont la radiation était prévue pour intervenir rapidement furent numérotées 99 7101 et au-delà.
Au sein des quatre plages principales, l’incrémentation suivit à peu près l’augmentation du nombre d’essieu, comme cela avait été le cas pour les machines des séries 01 à 96.
La DRG attribua à toutes ses locomotives à vapeur une désignation de catégorie qui figurait sur des plaques en fonte placées sur les flancs gauche et droit de l’abri.
De base, toutes les locomotives pour voies étroites reçurent la lettre de catégorie « K » (pour « Kleinbahnlokomotiven » - Locomotives pour chemins de fer à « petite » voie). La lettre était, comme pour toutes les autres vapeurs de la DRG, suivie de chiffres arabes décrivant la disposition d’essieux puis, séparé par un point, le poids supporté par l’essieu accouplé médian. De ce fait, la catégorie K 57.9 désignait une locomotive comportant cinq essieux accouplés, deux essieux porteurs (soit au total sept essieux) et dont l’essieu accouplé médian supportait une charge de neuf tonnes. Dans ce cas précis, il s’agissait d’une locomotive 1’E1’h2 de la série 9973-76.
Après la guerre, la DB comme la DR conservèrent cette numérotation. Cependant celle-ci tomba en désuétude à la DB après 1950.
A l’issue de ce préambule, nous allons maintenant passer en revue les locomotives pour voies étroites intégrées à la DRG. Par souci de simplicité, nous allons suivre l’ordre de la numérotation plutôt que de créer des sous chapitres par compagnies d’origine.