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Monsieur Ang ... élo

MessagePosté: 17 Juin 2013, 17:15
par gib
Un court extrait du tome deux, juste comme ça ...

En revenant de Belgique, Judith consacra plusieurs soirées à se renseigner sur les arts manuels, pour découvrir un site traitant de modélisme annonçant une exposition au Grand Palais. Elle essaya, sans succès, de convaincre son mari de s'y rendre, un dimanche pendant lequel il n'assurait pas la permanence, et devant son refus, elle se résolut à y aller seule.

Elle y passa la plus grande partie de la journée, et posa de nombreuses questions aux artisans qui présentaient leurs travaux, particulièrement ceux réalisant des décors en trois dimensions, à base de plâtre. Elle découvrait un monde nouveau, tout de finesse, en admirant des réseaux de trains miniatures, élaborés patiemment et avec minutie, par beaucoup de ces amateurs qui exposaient leurs chefs-d’œuvre.

Elle rencontra le gestionnaire de ce site, lui-même exposant, accompagné de quelques-uns de ses collaborateurs, tout de vert habillés avec des t-shirts marqués "Forum-train", et engagea la discussion pour exposer son projet. Elle expliqua avoir vu un mausolée, et vouloir le reproduire sous forme d'une maquette, qu'elle voulait placer dans son salon, en hommage à sa sœur, partie trop tôt. Les conseils que cette équipe lui prodigua lui permirent de trouver toutes les fournitures nécessaires, de nombreux commerçants étant présents, et elle rentra le soir, les bras chargés de plusieurs paquets.

Avant de quitter l'exposition, elle la parcourut à nouveau pour regarder les stands des exposants qu'elle n'avait pas encore vus, et resta songeuse en se rendant compte que ce milieu regorgeait également de professionnels qui tentaient de vendre leurs produits. Un petit éditeur, motrice-magazine, offrait même des porte-clés à ceux qui s'abonnaient, essayant de fidéliser d'éventuels clients. Elle s'amusa à penser que cet exposant, qui se présentait d'une voix tonitruante à tous ceux qui passaient à proximité sous le nom de Monsieur Angelo, aurait, pour le moins, pu porter une cravate.

Il lui restait à acquérir un dernier élément. Judith proposa à Emi de l'accompagner chez un antiquaire, pour trouver un petit meuble ancien à tiroirs, avec des pieds ouvragés, et elles s'accordèrent sur le dimanche suivant pour en faire l'achat, après avoir consulté d'anciens catalogues, conservés par elle depuis plusieurs mois.
Elle s'attela à la tâche dès le lendemain, et profitait de chaque instant de loisir pour mener à bien sa réalisation. Les photos prises en Belgique lui furent de la plus grande utilité pour dessiner les premières formes composant sa maquette, qu'elle peaufinait petit à petit, se couchant souvent avec l'extrémité des doigts blanches de plâtre. Elle termina l 'objet après un mois de travail, le décorant finalement de symboles dorés représentant les mouvements du soleil et de la lune, avant de le poser sur le petit meuble, encadré de deux bougies, deux âmes, celles de deux sœurs réunies.

Travailler de ses mains, malgré la douleur qui la rongeait, ces efforts déployés pendant quelques semaines, avait développé son sens du toucher, qui résonnait à présent en elle telle une ode composée pour son ainée.

© Ned Leztneik