par jeanluc4343
08 Juil 2019, 18:50
Je suis dans l'incapacité totale de reprendre mes activités. Pour savoir ce qui m'arrive, lisez la lettre ci-dessous que j'adresse an droit de réponde à un article lénifiant sur la "balade irlandaise" à laquelle j'ai participé :
"Monsieur le rédacteur en chef,
« La Montagne » du 6 juillet dernier publie, en bas de page 12, un article d’une trentaine de lignes relatant « la balade irlandaise » du foyer culturel de Varetz. Comme cet article insignifiant, tant dans son contenu que dans sa tonalité, conclue « Tous les participants ont été ravis de ce voyage … », j’estime, en tant que participant, avoir le droit d’exprimer dans vos colonnes le point de vue légèrement dissonant que voici :
La « balade irlandaise » du 39ème participant :
Tout d’abord quelques constats :
Primo, sur les plus de 3 850 km effectués en autocar, il faut noter que plus de 2 100 km (soit les 4/7ème du total) n’ont servi qu’à approcher les côtes irlandaises ou à effectuer le parcours retour de Roscoff à Brive. Le génie des autocaristes est sans limites puisqu’ils parviennent à vous vendre plus du double des km nécessaires à votre voyage. Il faut également noter que le détour obligé par le tunnel sous la Manche a bien failli s’arrêter à Calais. En effet, deux heures avant le départ de notre navette, l’opérateur ferroviaire procédait à l’annulation de tous les passages prévus vers l’Angleterre. La cause était un accident sur l’un des deux tunnels obligeant l’opérateur ferroviaire à actionner deux des nombreuses bretelles qui relient les deux tunnels sur la totalité de leurs parcours ainsi que ses installations permanentes de contresens (IPCS) ce qui autorisait, moyennant annulation de quelques trains, la circulation de l’ensemble des convois sur un court tronçon de l’autre tunnel alors exploité en voie unique à double sens de circulation. Comme par ailleurs, les deux navettes annulées qui précédaient la notre n’étaient pas complètes, l’opérateur put finalement nous proposer, après seulement un peu plus d’une heure de doute, un passage vers l’Angleterre quasiment à l’heure initialement prévue. Pour une fois qu’un transporteur ne se contente pas d’annuler purement et simplement un voyage payé d’avance (tel Brittany Ferry) le fait mérite au moins d’être signalé !
Secundo, l’ancien maître d’ouvrage public que je suis, fut effaré de constater l’absence de conformité aux normes, françaises et européennes, de sécurité des établissements recevant du public, et d’accessibilité, de la plupart des lieux d’hébergement qui nous furent proposés au cours de cette balade irlandaise. L’hôtel anglais du premier soir constituant à lui seul une véritable caricature : nombreux escaliers montants, descendants et remontants, couloirs étroits et tarabiscotés, portes soi-disant « coupe-feu » ne servant qu’à entraver l’avancement rapide des usagers, aucun indication de sortie de secours et de la moquette combustible partout. Si un incendie se produit dans cet hôtel le bilan sera catastrophique !
Tertio, le groupe de 39 eut un comportement le plus souvent sympathique. Seul un groupe de six refusa presque catégoriquement de « se mélanger » aux autres. Néanmoins, il faut aussi reconnaître que presque chaque soir, entre la sortie des bagages et la distribution des clés des chambres, ce groupe se comportera tel un troupeau indiscipliné et vindicatif, certains voulant à tout force être servis en premier même s’il fallait pour cela écraser les pieds des autres pour y parvenir.
Quarto, le passage imprévu par Angleterre et Galles se traduisit par la quasi suppression de la visite de Dublin qui donnera lieu à un petit tour d’autocar le soir de notre arrivée en terre irlandaise puis à la visite de deux monuments le lendemain matin. A ce propos, bien que non-croyant, je fus scandalisé par le comportement de hordes de touristes asiatiques et britanniques qui parlaient forts, s’interpellaient et se dirigaient rapidement en tous sens, sans aucune considération pour le caractère sacré du lieu ni pour l’office qui s’y déroulait et dont on parvenait à peine à entendre les chants. Vraiment intolérable !
Venons en maintenant à la soirée du 12 juin.
Nous étions à Newport, dans un hôtel aussi peu conforme aux normes de sécurité incendie et d’accessibilité que les autres. Notre repas du soir nous fut servi au sous-sol, dans une véritable glacière (il faisait environ 20° au dehors mais nettement moins dans cette pièce lugubre). Pour la énième fois on nous servit du poisson purée. Cette fois ci c’était du Merlu. Ma voisine de table ne cessait de dire (avec raison) qu’il « sentait fort » et « n’était pas frais ». Mais, j’avais faim et je finissais mon assiette quand de nombreux autres préféraient ne manger que la purée ou même ne rien absorber du tout.
Environ 4 heures plus tard, je fus saisi de violentes crampes d’estomac qui durèrent toute la nuit. Malgré le gonflement de mon estomac il me fut impossible d’en évacuer le contenu, ni par le haut, ni par le bas. Bien entendu je ne pus rien absorber du petit déjeuner et ce n’est que dans l’autocar prêt au départ qu’enfin je pus vomir une partie de mon repas de la veille dans un sac plastique que par précaution je gardais avec moi.
A ce spectacle, et sans m’en avertir, l’organisation décidait de me prendre RV (à mes frais) auprès d’un médecin de la ville étape suivante de Galway. Cet homme était également coroner (disons médecin légiste) de Galway. Après palpations et rapide compte-rendu traduit par notre guide irlandais, le docteur Macloughlin livra un verdict dénué d’ambiguïtés :
- me voyant seul à souffrir dans un groupe de 39, il voulut d’abord écarter l’hypothèse d’une simple indigestion. A cet effet, il prescrivit l’absorption de deux comprimés de paracétamol par repas avec beaucoup d’eau pendant 24 h.
- néanmoins, le coroner qu’il était, sans doute habitué à voir des cas plus complexes, n’écartait point l’hypothèse d’une intoxication alimentaire. Il poursuivit dons son ordonnance verbale par les mots suivants : « Si les symptômes persistent après 24h de paracétamol et eau, alors il faudra impérativement vous rendre aux urgences hospitalières avant que 48 h ne se soient écoulées ». Je fis répéter cette injonction au guide irlandais devenu livide. Voyant et comprenant cela le coroner ajouta « ne prenez pas ce conseil à la légère ce sera pour vous une question de vie ou de mort et à brève échéance ! »
Evidemment l’organisation n’était ni présente ni représentée à ce RV. Evidemment les comprimés de paracétamol et quelques gorgées d’eau, seuls « aliments » que je pus absorber au cours de ces 24 h ne furent d’aucun effet. Après une nouvelle nuit de torture, je tentais vainement de faire appliquer la seconde partie de la prescription médicale, allant même jusqu’à proposer de payer moi-même les frais de mon rapatriement d’urgence en France. Peine perdue. Seulement verbale cette seconde partie de la prescription médicale ne sera pas retenue par l’organisation. Il me faudra continuer le voyage jusqu’à son terme, le 16 juin vers 21h à Varetz en parvenant de moins en moins à cacher l’extrême douleur qui m’envahissait.
C’est plié en deux et tremblant de fièvre que je me rendis enfin chez mon médecin traitant, après les refus successifs du SAMU et des pompiers de me conduire aux urgences la nuit précédente. Il me fit le bon d’entrée aux urgences de la clinique des Cèdres ou je subit alors une série d’examen :
- urines : RAS
- sang : taux anormaux de globules blancs (mes défenses immunitaires) et de PCR (l’attaque bactérienne) avec un taux plus de 30 fois supérieur à la norme ;
- radiographies : RAS
- scanner abdomino-pelvien : il révèlera une « ectasie des cavités excrétrices intra rénales gauche d’aspect plutôt inflammatoire compatible avec une pyélite …. »
Ainsi donc la bactérie avait mis à profit les cinq longues journées d’attente qui m’ont été imposées par l’organisation pour s’installer durablement à l’intérieur de mon rein gauche ou il serait désormais nettement plus difficile de l’en déloger. La prédiction du coroner irlandais se vérifiait, c’était bien un combat à mort qui s’était engagé.
Aujourd’hui (8 juillet), je suis sorti de mon second séjour aux urgences depuis quelques jours et ai scrupuleusement suivi l’ordonnance de sortie (intraveineuses quotidiennes d’antibiotiques). J’attends avec une certaine angoisse le résultat de l’analyse de sang qu’une infirmière de Varetz est venue prélever à mon domicile ce matin, sans trop d’illusion car mes deux reins me font toujours autant souffrir rendant mon sommeil nocturne presque impossible. Voila bientôt un mois que je ne peux plus dormir.
Je ne sais qui de la bactérie ou de l’homme sortira vainqueur de cette histoire. Si c’est l’homme, alors il faudra que l’organisateur de cette « balade irlandaise » assume, devant la justice, sa part de responsabilité sur le fondement de la triple accusation suivante :
- responsabilité du choix d’un restaurateur qui, le 12 juin, n’a pas hésité à servir une nourriture avariée et dangereuse ;
- total irrespect de la prescription médicale irlandaise pourtant effectuée à sa demande le 13 juin ;
- et non assistance à personne en danger de mort alors qu’elle se trouve sous sa responsabilité d’organisateur de voyages et qu’elle ne possède plus depuis longtemps la faculté de se sauver elle-même par ses propres moyens.
Voila, Monsieur le Rédacteur en Chef le point de vue du 39ème voyageur de cette si sympathique balade irlandaise. Permettez moi d’espérer être encore vivant lorsque vous la publierez.
Cordialement.
Jean-Luc SAUVESTRE"
Il est 18h30 ce 8 juillet et je viens de recevoir les résultats de l'analyse sanguine de ce matin. Ils ne sont pas bons, l'attaque bactérienne qui n'était que 25 fois supérieure à la norme à ma seconde entrée aux urgences, puis environ 20 fois supérieure lors de ma sortie il y a 5 jours est désormais plus de 30 fois supérieure, ce qui signifie que les 10 derniers jours de traitement (parfois douloureux) n'ont strictement servi à rien.
Je suis anéanti. Mon médecin traitant que je vois ce soir à 20h trouvera peut être q'une troisième entrée aux urgences en moins de 21 jours servira encore à quelque chose.
Dans le doute et, le moral au fond des chaussettes, je préfère vous dire Adieu; je n'ose encore avertir mes enfants de l’extrême gravité de mon état ....
Cordialement. JLS